Les adolescents, les jeunes et la santé mentale en Côte d’Ivoire

La santé mentale des jeunes est une préoccupation urgente qui requiert notre attention. Tout comme beaucoup d’autres pays, ce problème touche la Côte d’Ivoire dont le bien-être mental des jeunes a un impact significatif sur leur développement global et leurs perspectives d’avenir. L’impact de ces problèmes de santé mentale sur cette population vulnérable va bien au-delà du bien-être individuel affectant ainsi, divers aspects de leur vie. Le problème de l’accessibilité et de la qualité des soins, le déni hypertrophié face à ce problème demeurent des préoccupations importantes qui méritent d’être développées. Cet article vise à faire la lumière sur l’état de la santé mentale chez ces jeunes vivant en Côte d’Ivoire, en examinant les facteurs contextuels, en soulignant l’impact et en proposant des recommandations pour aborder et améliorer la question de la santé mentale de cette population vulnérable.

ANALYSE DE LA SITUATION EN COTE D’IVOIRE 

La santé mentale demeure un problème important qui touche en plus des adolescents, les jeunes. Ce qui fait de ce mal, un défi prioritaire de santé publique. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), on estime qu’au niveau mondial, 10 à 20 % des adolescents sont confrontés à des problèmes de santé mentale. Dans son rapport sur la santé mentale, l’Organisation Mondiale de la Santé estimait que les troubles mentaux toucheraient environ 450 millions de personnes dans le monde. Bien que les chiffres spécifiques à la Côte d’Ivoire ne soient pas connus, le constat est toutefois assez parlant et est de plus en plus préoccupant.

En effet, La Côte d’Ivoire enregistre le 3ème taux le plus élevé de suicide en Afrique avec 23 cas par an, selon une étude de l’Unité de Médecine Légale du service d’Anatomopathologie du Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Treichville (Abidjan). Dans les 24 000 décès enregistrés en 2023, 101 cas de suicide ont été confirmés entre 20 et 29 ans dû à des troubles mentaux (37,6 %). En Côte d’Ivoire malheureusement ce problème demeure un tabou malgré un taux parmi les plus élevés au monde. En effet, le pays se situe au trentième rang mondial et au troisième rang africain. Si le suicide est considéré comme un problème de santé majeur par l’OMS, il n’en est pas forcément de même pour les autorités ivoiriennes, car il n’existe pas à ce jour, de stratégie nationale de prévention de santé mentale en Côte d’Ivoire, lorsque l’on sait que les facteurs de risque sont dominés par les troubles mentaux qui débutent à l’adolescence favorisés par les problèmes familiaux (9,9 %) et sociaux (7,9 %). Bien que les chiffres soient endémiques aux jeunes, il n’en demeure pas moins que cela constitut un danger pour les adolescent-e-s qui demeurent la cible la plus à risque. Il est donc essentiel de comprendre ce contexte pour élaborer des stratégies efficaces de soutien aux adolescent-e-s en matière de santé mentale.

IMPACTS 

Les problèmes de santé mentale ont des conséquences importantes sur le bien-être général, le développement et le fonctionnement quotidien des adolescent-e-s et jeunes.

En Côte d’Ivoire, certains adolescents et jeunes souffrant de problèmes de santé mentale ont adopté des comportements à risque comme l’alcoolisme (35.73%), la toxicomanie (37.4%), des pratiques sexuelles dangereuses ou de délinquance pour faire face ou échapper à leur douleur émotionnelle. Ces comportements ont d’autres conséquences négatives et entraînent des dommages potentiels à long terme.

Vu que ces troubles ne sont pas traités en raison des stéréotypes liés à la santé mentale en Côte d’Ivoire, ils entravent le développement d’aptitudes importantes pour la vie quotidienne, la régulation émotionnelle, les mécanismes d’adaptation et les capacités de résolution de leurs problèmes. Ce qui a des effets néfastes durables sur leur capacité à faire face aux défis et aux transitions à venir.

De tout ce qui précède, nous comprenons bien que la santé mentale est un défi important qui implique plusieurs facteurs dont les conséquences sont irréversibles. La reconnaissance de l’intersectionnalité de ces facteurs est cruciale pour comprendre les défis uniques auxquels sont confrontés les adolescents en Côte d’Ivoire. En reconnaissant ces leçons, nous pouvons collectivement travailler à la création d’un environnement favorable qui donne la priorité à la santé mentale. En investissant dans des services accessibles, des interventions précoces et la promotion de la résilience nous pouvons donner aux adolescent-e-s et jeunes en Côte d’Ivoire, les moyens de relever les défis auxquels ils sont confrontés. 

Recommandations

Des efforts sont faits dans ce sens par le gouvernement ivoirien, les organisations non gouvernementales et les organisations internationales en Côte d’Ivoire. Cependant, ces efforts restent insuffisants pour faire face à ce problème de santé publique. Afin donc d’accroitre les efforts, nous préconisons les initiatives suivantes :

– augmenter la disponibilité de professionnels de santé mentale qualifiés, en développant les programmes de santé mentale communautaires et en intégrant la santé mentale dans les structures de soins de santé primaires ;

– mettre en place, des stratégies d’intervention et de prévention précoces, telles que les programmes de santé mentale en milieu scolaire, le dépistage précoce des troubles mentaux et la mise en place de systèmes de soutien adéquats pour les adolescents à risque ;

– mener des actions de plaidoyer pour lutter contre la stigmatisation et la discrimination associées à la santé mentale et recommander des changements de politique qui donnent la priorité à la santé mentale des adolescents, y compris un financement accru, l’élaboration de stratégies nationales en matière de santé mentale et l’application des lois existantes sur la santé mentale ;

– adopter une approche globale et intégrée de la santé mentale des adolescents, qui implique une collaboration entre les agences gouvernementales, les prestataires de soins de santé, les écoles et les ONG afin de traiter les problèmes de santé mentale chez les adolescents le plus tôt possible pour une intervention efficace et la prévention des conséquences à long terme ;

– promouvoir une communication ouverte entre les parents et les adolescents, en fournissant un environnement de soutien et d’épanouissement ;

– augmenter le nombre de psychiatres qui demeure à 50 pour 27 millions d’habitants dont la majorité exercent dans la capitale. Il va falloir faire passer ce ratio à échelle nationale, même s’il existe le Programme national de santé mentale (PNSM) qui dénombre 57 structures de prise en charge des troubles psychiatriques (30 publiques, 12 privées, 14 confessionnelles.